Voulez-vous des enfants ?
Combien de fois ne vous a-t-on pas posé cette question ? Plus d’une si vous approchez de la trentaine ou de la quarantaine et que vous n'avez jamais promené un bambin en poussette...
Pour la majorité de ceux qui sont « parents », celui qui n'a pas d'enfant est probablement un candidat malheureux à la parentalité.
Plus rarement quelqu'un qui a « choisi » d'être « sans enfant »
A noter que le vocabulaire marque du sceau du « manque » les « non-parents ». Certains d'entre eux se sont alors baptisés, non sans humour, les « no kidding », jouant sur les mots « pas d'enfant/pas de blague ».
Et que répondre si vous n’êtes pas sûr(e) de vouloir devenir parent ? Le social, normatif pour le moins, tolèrera-t-il une réponse négative à cette question ? Le désir d’enfant serait- il programmé génétiquement comme un instinct de survie à la manière des animaux ? Si la réponse était « oui », pourquoi dès lors se donner la peine de faire intrusion en questionnant l’autre sur son désir ?
Comment parler du désir d’enfant sans évoquer les demandes d’IVG, en augmentation en Belgique ces dernières années ?... sachant que l'augmentation de ces demandes ne concerne pas les mineures comme on pourrait le croire mais les femmes âgées d’une vingtaine d’années. La question du désir d’enfant n’étant pas une question universelle ni intemporelle : on n’a pas toujours été autorisée à avorter et on ne l'est toujours pas partout...
Et désirer avoir un enfant implique-t-il nécessairement de le « fabriquer » soi-même ? Faut- il sentir un enfant dans sa chair pour développer un sentiment d’amour à son égard avant même de le tenir dans ses bras ? Et si tous les parents devaient « adopter » leur enfant, quelles que soient les modalités de sa venue ?
Le désir d’enfant serait-il fonction de la pression sociale ?
Il semblerait que oui. Si 10% des Belges reconnaissent opter pour la parentalité pour faire plaisir à leurs propres parents -ou du moins ne pas trop leur déplaire (sondage effectué par « La Libre Belgique »)- en revanche, une Allemande sur quatre choisit de ne pas procréer, soit trois fois moins de candidates à la maternité qu’en Belgique ou en France (chiffres de l’INSEE).
Parce que la pression pour être une mère parfaite est trop forte ? Chez nous, il n’y a qu’à visiter une maternité pour en avoir un aperçu : partout, des affiches prônant l'allaitement, enfonçant le clou jusqu'à se proclamer « hôpital ami des bébés ». cela reviendrait-il à dire que allaiter, c'est se positionner en tant qu’ennemi des mères ? Faut-il choisir entre les deux camps : la mère ou l’enfant ?
Le « tout pour l'allaitement », même si justifiable d'un point de vue prophylactique, n'est-il pas un recul du féminisme si chèrement acquis par nos mères ? Ou au contraire n’évacuerait-il pas de la scène parentale les hommes, à peine leur enfant né, tel un « intrus » dans cette dyade mère-enfant marquée d'un idéal mortifère à force de sacralité? Les excès de la « Leche League », « virant » hors du lit conjugal le père au profit du bébé, dans une interprétation « fanatique » du «co-dodotage » ont de quoi inquiéter.
Vouloir un enfant/Ne pas vouloir d’enfant : qui parvient le plus facilement à expliquer ses motifs ?
Une part croissante de ceux qui optent pour ne pas devenir parent avance des raisons liées au « précariat » (faibles revenus salariaux, augmentation des coûts énergétiques, coût et faible nombre des structures d’accueil de la petite enfance) mais aussi à la paupérisation du tissu social dont familial. L’âge moyen auquel les femmes belges donnent naissance à leur premier enfant est 28 ans (31 en région parisienne et dans les couches les plus diplômées), soit un chiffre non lié au pic de fécondité mais plutôt au contexte socio-économique. C'est alors une course contre la montre pour certaines, quitte à tourner à l'obsession
Et pourquoi veulent-elles ou veulent-ils un enfant ? Les raisons des candidats à la parentalité semblent relever de raisons difficilement explicables contrairement à celles avancées par les non candidats : ceux qui veulent des enfants « ont en envie parce qu'ils ont envie » là où ceux qui n'en veulent pas avancent plus facilement des motifs rationnels.. ou rationnalisés ? A force d'être convoqué sur la question, on finit peut-être par affuter ses arguments?
...D'ailleurs, doit-on justifier ses choix ? Faut-il se reconnaître dans une catégorie quelle qu'elle soit ? En quoi sommes-nous autorisés à avoir un avis sur les nouveaux candidats à la parentalité (couples homosexuels ou femmes célibataires)?
Pour autant, refuser les étiquettes ne dispense pas de s'interroger sur son désir dans un contexte où l'on parle plus volontiers de son « droit à » plutôt que de son « envie de ». Parce que désirer n'est pas consommer. Le juridique n'existe que pour protéger le social, pas pour imposer ses normes et favoriser le tout à la consommation. Et les lois, comme les avis des professionnels de la santé mentale interrogés sur les éventuels dangers de l'homoparentalité, ne sont pas là pour juger les nouveaux candidats à la parentalité mais pour permettre à chacun de vivre sa situation sans être inquiété et sans trop s'inquiéter. Il n'existe pas de « formation pour devenir parent » et c'est heureux. longue vie aux citoyens responsables qui continueront de s'interroger sur leurs propres envies, leurs compétences.. Et, à nous, professionnels éventuellement interrogés voire mandatés, de soutenir leur désir pour que les choix de chacune et de chacun puissent être assumés dans un contexte le plus harmonieux possible. Le « vrai pour soi » est ce qui nous concerne, avant tout.
Et vous, lectrices, lecteurs, jusqu’où seriez-vous prêt(e)s à aller pour avoir un enfant ?
Cette question, médecins gynécologues, psychologues, la posent aux femmes et aux couples en demande de procréation médicalement assistée (PMA), comme aux candidats à l’adoption : que faire avec son désir (inassouvi) de ne pouvoir procréer « naturellement » ? Jusqu'où aller ? C'est avant tout une question éthique : faut-il ou non franchir les barrières générationnelles (par exemple, en devenant la mère de son petit-fils/fille lorsque la mère ne peut procréer sans greffe d'utérus). C'est aussi une question subjective. Après tout, devenir parent n'est pas une obligation et chacun devra pouvoir poser ses limites, faire demi-tour quand il le souhaite afin que le désir d'enfant ne devienne pas obsédant... pour les (nouveaux) candidats à la parentalité comme pour le social qui les questionne.
Le Centre Médical L’Elan vous invite à réféchir à ces questions et à venir en débattre avec nous le 24/10/13 à la conférence « Désir d’enfant…désir obsédant ? »